The Penguin Book of French Poetry Read online
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Dans un grand nonchaloir chargé de souvenir!
Ainsi, pris du dégoÛt de l’homme à l’âme dure
Vautré dans le bonheur, où ses seuls appétits
Mangent, et qui s’entête à chercher cette ordure
Pour l’offrir à la femme allaitant ses petits,
Je fuis et je m’accroche à toutes les croisées
D’où l’on tourne l’épaule à la vie, et, béni,
Dans leur verre, lavé d’éternelles rosées,
Que dore le matin chaste de l’Infini
Intoxicated, he is alive, forgetting the horror of the holy oils, the infusions, the clock and the confinement to bed, the cough; and when evening bleeds among the tiles, his eye, on the horizon gorged with light,
Sees golden galleys, beautiful as swans, sleeping on a river of purple and perfumes cradling the rich and tawny brilliance of their form in a great warm indolence heavy with memory!
Thus, seized with loathing for man with his hardened soul wallowing in contentment where his appetites alone eat, and who persistently seeks that filth to offer it to the woman giving milk to her children,
I escape and cling to all the windows from which one turns one’s shoulder on life, and, blessed, in their glass, cleansed by eternal dews, gilded by the chaste morning of the Infinite
Je me mire et me vois ange! et je meurs, et j’aime
– Que la vitre soit l’art, soit la mysticité–
A renaître, portant mon rêve en diadème,
Au ciel antérieur où fleurit la Beauté!
Mais, hélas! Ici-bas est maître: sa hantise
Vient m’écoeurer parfois jusqu’en cet abri sÛr,
Et le vomissement impur de la Bêtise
Me force à me boucher le nez devant l’azur.
Est-il moyen, ô Moi qui connais l’amertume,
D’enfoncer le cristal par le monstre insulté
Et de m’enfuir, avec mes deux ailes sans plume
– Au risque de tomber pendant l’éternité?
I see myself mirrored and see myself angel! and I am dying, and I love – let the glass pane be art, and be mysticism – to be reborn, bearing my dream as a diadem, in that antecedent heaven where Beauty flourishes!
But alas! the here-below is master: its haunting presence comes to nauseate me sometimes even in this safe refuge, and the tainted vomit of Stupidity makes me hold my nose in the face of the azure.
Is there a way, O Self familiar with bitterness, of breaking through the crystal insulted by the monstrous and escaping with my two featherless wings – at the risk of falling for all eternity?
Brise marine
La chair est triste, hélas! et j’ai lu tous les livres.
Fuir! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux!
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe
O nuits! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature!
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs!
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages
Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots…
Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots!
Sea Wind
The flesh is sad, alas! and I’ve read all the books. To escape! escape out there! I sense that birds are drunk to be amidst the unknown foam and the skies! Nothing, not old gardens reflected in eyes will hold back this heart which immerses itself in the sea O nights! nor the desolate brightness of my lamp on the empty paper defended by its whiteness nor even the young wife with her child at the breast. I will leave! Steamer swaying your masts, hoist anchor for exotic climes!
A Tedium, ravaged by cruel hopes, still believes in the supreme farewell of handkerchiefs! And, perhaps, the masts, inviting storms, are of the kind that a wind tilts over shipwrecks lost without masts, without masts or fertile isles… But, O my heart, hear the sailors’ song!
L’Aprés-midi d’un faune
Églogue
LE FAUNE
Ces nymphes, je les veux perpétuer.
Si clair,
Leur incarnat léger, qu’il voltige dans l’air
Assoupi de sommeils touffus.
Aimai-je un rêve?
Mon doute, amas de nuit ancienne, s’achève
En maint rameau subtil, qui, demeuré les vrais
Bois mêmes, prouve, hélas! que bien seul je m’offrais
Pour triomphe la faute idéale de roses.
Réfléchissons…
The Afternoon of a Faun
Eclogue
THE FAUN
I want to perpetuate these nymphs.
So bright, their light incarnadine, that it flutters in the air drowsy with tufted slumbers.
Did I love a dream? My doubt, accumulation of old darkness, ends in many a tenuous bough which, remaining the true woods themselves, proves, alas! that I offered myself alone for triumph the ideal sin of roses. Let us reflect…
ou si les femmes dont tu gloses
Figurent un souhait de tes sens fabuleux!
Faune, l’illusion s’échappe des yeux bleus
Et froids, comme une source en pleurs, de la plus chaste
Mais, l’autre tout soupirs, dis-tu qu’elle contraste
Comme brise du jour chaude dans ta toison?
Que non! par l’immobile et lasse pâmoison
Suffoquant de chaleurs le matin frais s’il lutte,
Ne murmure point d’eau que ne verse ma flÛte
Au bosquet arrosé d’accords; et le seul vent
Hors des deux tuyaux prompt à s’exhaler avant
Qu’il disperse le son dans une pluie aride,
C’est, à l’horizon pas remué d’une ride,
Le visible et serein souffle artificiel
De l’inspiration, qui regagne le ciel.
Or suppose the women that you expound represent a desire of your fable-rich senses! Faun, illusion escapes like a weeping spring from the blue and cold eyes of the most chaste: but the other, all sighs, do you say she contrasts like a day breeze warm in your fleece! No! through the motionless and torpid swoon suffocating the cool morning with heat if it struggles, there murmurs no water but that poured by my flute on the grove sprinkled with chords; and the only wind quick to exhale itself from the two pipes before it disperses the sound in an arid rain, is, on the horizon unstirred by any wrinkle, the visible, serene and artificial breath of inspiration, returning to the sky.
O bords siciliens d’un calme marécage
Qu’à l’envi de soleils ma vanité saccage,
Tacite sous les fleurs d’étincelles, CONTEZ
“Que je coupais ici les creux roseaux domptés
Par le talent; quand, sur l’or glauque de lointaines
Verdures dédiant leur vigne à des fontaines,
Ondoie une blancheur animale au repos:
Et qu’au prélude lent où naissant les pipeaux
Ce vol de cygnes, non! de naïades se sauve
Ou plonge…”
Inerte, tout brÛte dans l’heure fauve
Sans marquer par quel art ensemble détala
Trop d’hymen souhaité de qui cherche le la:
Alors m’éveillerai-je à la ferveur première,
Droit et seul, sous un flot antique de lumière,
Lys! et l’un de vous tous pour l’ingénuité.
O Sicilian shores of a calm marsh that my vanity plunders, rivalling suns, tacit beneath the flowers of the sparks, TELL ‘That I was cutting here the hollow reeds tamed by talent; when, on the glaucous gold of distan
t verdures inscribing their vine on springs, an animal whiteness undulates to rest: and that at the slow prelude in which the pipes are born this flight of swans, no! of naiads flees or dives…’
Inert, all burns in the tawny hour without showing by what art ran off together an excess of hymen desired by him who seeks the A-note: then I shall awaken to the primary fervour, erect and alone, under an ancient flood of light, lilies! and one of you all in ingenuousness.
Autre que ce doux rien par leur lèvre ébruité,
Le baiser, qui tout bas des perfides assure,
Mon sein, vierge de preuve, atteste une morsure
Mystérieuse, due à quelque auguste dent;
Mais, bast! arcane tel élut pour confident
Le jonc vaste et jumeau dont sous l’azur on joue:
Qui, détournant à soi le trouble de la joue,
Rêve, dans un solo long, que nous amusions
La beauté d’alentour par des confusions
Fausses entre elle-même et notre chant crédule;
Et de faire aussi haut que l’amour se module
Évanouir du songe ordinaire de dos
Ou de flanc pur suivis avec mes regards clos,
Une sonore, vaine et monotone ligne.
Other than this sweet nothing rumoured by their lip, the kiss, which quietly gives assurance of the treacherous, my breast, virgin of proof, bears witness to a mysterious bite, due to some august tooth; but enough of that! such a mystery chose for confidant the immense twin reed on which we play beneath the azure: which, turning to itself the cheek’s emotion, dreams in a long solo that we were entertaining the beauty around us by false confusions between itself and our credulous song; and, as high as love can be modulated, of making vanish, from the ordinary dream of back or pure flank followed through my closed eyes, a resonant, vain and monotonous line.
Tâche done, instrument des fuites, ô maligne
Syrinx, de refleurir aux lacs où tu m’attends!
Moi, de ma rumeur fier, je vais parler longtemps
Des déesses; et par d’idolâtres peintures,
A leur ombre enlever encore des ceintures:
Ainsi, quand des raisins j’ai sucé la clarté,
Pour bannir un regret par ma feinte écarté,
Rieur, j’élève au ciel d’été la grappe vide
Et, soufflant dans ses peaux lumineuses, avide
D’ivresse, jusqu’au soir je regarde au travers.
Try then, instrument of escapes, O wicked Syrinx, to flower once more on the lakes where you await me. I, proud of my murmur, shall speak at length of the goddesses; and by idolatrous paintings from their shadow lift still more girdles: thus, when I have sucked the grapes’ brightness to banish a regret moved aside by my pretence, laughing, I raise the empty cluster to the summer sky and, blowing in its luminous skins, greedy for drunkenness, until evening I gaze through it.
O nymphes, regonflons des SOUVENIRS divers.
“Mon œil, trouant les joncs, dardait chaque encolure
Immortelle, qui noie en l’onde sa brÛlure
Avec un cri de rage au ciel de la forêt;
Et le splendide bain de cheveux disparaît
Dans les clartés et les frissons, ô pierreries!
J’accours; quand, à mes pieds, s’entrejoignent (meurtries
De la langueur goÛtée à ce mal d’étre deux)
Des dormeuses parmi leurs seuls bras hasardeux;
Je les ravis, sans les désenlacer, et vole
A ce massif, haï par l’ombrage frivole,
De roses tarissant tout parfum au soleil,
Où notre ébat au jour consumé soit pareil.”
Je t’adore, courroux des vierges, ô délice
Farouche du sacré fardeau nu qui se glisse
Pour fuir ma lèvre en feu buvant, comme un éclair
Tressaille! la frayeur secrète de la chair:
Des pieds de l’inhumaine au coeur de la timide
Que délaisse à la fois une innocence, humide
De larmes folles ou de moins tristes vapeurs.
“Mon crime, c’est d’avoir, gai de vaincre ces peurs
O nymphs, let us inflate once more some diverse MEMORIES. ‘My eye, piercing the reeds, darted on each immortal neck, that drowns its burning in the waters with a cry of rage to the forest sky; and the splendid bath of hair disappears in the pools of light and in the quiverings, O precious stones! I come running; when, at my feet, are clasped together (bruised by the languor tasted in this evil of being two) sleeping women amid their mere, daring arms; I carry them off, without disentangling them, and fly to this thicket, shunned by the frivolous shade, of roses drying up every perfume in the sunlight, where may our sport be like the consumed day.’ I adore you, wrath of virgins, O wild and timorous delight of the holy naked burden which slides away to escape my burning lip drinking, as lightning quivers! the secret terror of the flesh: from the feet of the heartless one to the heart of the timid one, abandoned at the same time by an innocence wet with wild tears or less sad vapours. ‘My crime is to have divided, happy at the conquest of these treacherous fears, the dishevelled tuft of kisses that the gods kept so well mingled: for scarcely was I going to hide a passionate laugh under the blissful coils of one alone (holding by a mere finger, so that her feather-like innocence might be tinted by her sister’s emotion taking fire, the little one, naive, not blushing:) when from my arms, loosened by vague deaths, that ever ungrateful prey frees herself with no pity for the sob with which I was still drunk.’
Traîtresses, divisé la touffe échevelée
De baisers que les dieux gardaient si bien mêlée:
Car, à peine j’allais cacher un rire ardent
Sous les replis heureux d’une seule (gardant
Par un doigt simple, afin que sa candeur de plume
Se teignît à l’émoi de sa soeur qui s’allume,
La petite, naïve et ne rougissant pas:)
Que de mes bras, défaits par de vagues trépas,
Cette proie, à jamais ingrate se délivre
Sans pitié du sanglot dont j’étais encore ivre.”
Tant pis! vers le bonheur d’autres m’entraîneront
Par leur tresse nouée aux cornes de mon front:
No matter! towards happiness others will pull me by their tresses knotted to the horns on my brow: you know, my passion, that, purple and ripe already, every pomegranate bursts and murmurs with bees; and our blood, in love with whoever will seize it, flows for all the eternal swarm of desire. At the hour when this wood is tinted with gold and ashes, a festival flares up in the darkened foliage: Etna! it is upon you visited by Venus placing her ingenuous heels upon your lava, when a sad slumber thunders or the flame exhausts itself. I hold the queen!
Tu sais, ma passion, que, pourpre et déjà mÛre,
Chaque grenade éclate et d’abeilles murmure;
Et notre sang, épris de qui le va saisir,
Coule pour tout l’essaim éternel du désir.
A l’heure où ce bois d’or et de cendres se teinte
Une fête s’exalte en la feuillée éteinte:
Etna! c’est parmi toi visité de Vénus
Sur ta lave posant ses talons ingénus,
Quand tonne un somme triste ou s’épuise la flamme.
Je tiens la reine!
O sÛr châtiment…
Non, mais l’âme
De paroles vacante et ce corps alourdi
Tard succombent au fier silence de midi:
Sans plus il faut dormir en l’oubli du blasphème,
Sur le sable altéré gisant et comme j’aime
Ouvrir ma bouche à l’astre efficace des vins!
Couple, adieu; je vais voir l’ombre que tu devins.
O certain punishment…
No, but the soul empty of words and this weighted body succumb late to the proud silence of noon: with no more ado we must sleep in forgetfulness of blasphemy, lying on the thirsty sand and how I love to open my mouth to the wine-
making star!
Couple, farewell: I’m going to see the shadow you became.
Sainte
A la fenêtre recelant
Le santal vieux qui se dédore
De sa viole étincelant
Jadis avec flÛte ou mandore,
Est la Sainte pâle, ètalant
Le livre vieux qui se déplie
Du Magnificat ruisselant
Jadis selon vêpre et complie:
A ce vitrage d’ostensoir
Que frôle une harpe par l’Ange
Formée avec son vol du soir
Pour la délicate phalange
Du doigt que, sans le vieux santal
Ni le vieux livre, elle balance
Sur le plumage instrumental,
Musicienne du silence.
Saint
In the window concealing the old sandalwood that is losing its gilt of her viol once sparkling with flute or mandola,
Is the pale saint; she displays the old unfolding book of the Magnificat flowing in ages past according to vespers and compline:
Within this monstrance glass brushed by a harp formed by the Angel with his evening flight for the delicate tip
Of the finger which, without the old sandalwood or the old book, she holds poised on the instrumental plumage, musician of silence.
Petit Air I
Quelconque une solitude
Sans le cygne ni le quai
Mire sa désuétude
Au regard que j’abdiquai
Ici de la gloriole
Haute à ne la pas toucher
Dont maint ciel se bariole
Avec les ors de coucher
Mais langoureusement longe
Comme de blanc linge ôté
Tel fugace oiseau si plonge
Exultatrice à côté
Dans l’onde toi devenue
Ta jubilation nue.